La radioactivité du quotidien en France
L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire nous donne (p.19) l’exposition moyenne par Française et par Français à la radioactivité ordinaire. .
En moyenne, nous sommes exposés à 4.5 mSv par an.
Sur ce total, une petite moitié vient de la radioactivité du sol (granit et radon essentiellement), une partie qui vient du rayonnement cosmique et de l’alimentation. Cette radioactivité naturelle représente en gros 3 mSv/an par Français.
Ensuite, un bon tiers de l’exposition moyenne vient de l’imagerie médicale. La radioactivité liée aux centrales nucléaires n’est même pas visible.
Si vous voulez l’exposition de quelques actes médicaux, sachez qu’une radio c’est infime, qu’une mammographie c’est 0.4 mSv, qu’un scanner des poumons (thorax) comme on en fait pour diagnostiquer le Covid c’est 7 mSv et qu’un scanner de l’abdomen c’est 15 mSv [Source : IRSN, p22]. Certaines interventions plus rares exposent encore davantage.
Le chiffre de 4.5 mSv c’est évidemment la moyenne. On vous met deux autres cas types construit à partir des données de l’IRSN.
Un individu “très exposé” à la radioactivité naturelle – du sol, de l’alimentation, etc. – peut encaisser 10 mSv chaque année. Et si, exceptionnellement, cet individu passe un scanner de l’abdomen ou d’autres examens très émetteurs, une Française ou un Français peut recevoir 24 mSv en une année.
Pour évaluer à quelle dose de radioactivité quotidienne vous êtes exposés vous, vous avez un calculateur fait par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire.
Ce calculateur vous dira combien de mSv vous vous prenez chaque année selon votre lieu de résidence, vos habitudes etc. 🙂
Voilà avec tout ça vous avez bien compris à quelle radioactivité quotidienne on est exposé en France.
L’air est plus radioactif ailleurs
Dans certains endroits du monde, des gens sont exposés naturellement 10 – 20 – 30 et encore plus de mSv chaque année.
C’est le cas à Pocos de Caldas, une région thermale du Minas Gerais au Brésil où les populations sont exposées à 13 mSv / an en moyenne [Source : Unscear 2017, p.117]
La même chose en Chine dans la ville côtière de Yangjiang où l’exposition au rayonnement naturel peut dépasser les 18 mSv / an [Source : Unscear 2017, p.113] .
Et le compteur de radioactivité naturelle peut exploser. Certains habitants du Kerala, en Inde, sont exposés à 45 mSv/an [Source : Hendry and al. 2009] et c’est pas le record du monde. Les champions sont Iraniens.
A Ramsar, une station balnéaire sur la Caspienne en Iran par exemple, leur sol riche en radon déposé par des sources d’eaux chaudes expose certains habitants à des doses bcp bcp plus importantes : jusqu’à 260 mSv/an de radioactivité naturelle dans certains pâtés de maison, quasiment 100 fois plus que la radioactivité naturelle en France [SOURCE : Abbasi and al. 2019].
Les doses reçues à Hiroshima et Nagasaki
La plus grande catastrophe nucléaire, et de loin, c’est les bombes atomiques largués par les Etats-Unis sur les villes japonaises d’Hiroshima et Nagasaki.
Le souffle de ces bombes a tué sur le coup entre 155 et 250 000 personnes. 284 000 personnes ont survécu à ces impacts mais, évidemment, elles ont été touchées par des rayonnements radioactifs.
Plus les survivants étaient proches de l’épicentre, plus ils ont été irradiés.
Les survivants les plus proches, à un peu plus d’1 km de distance de l’explosion, vous les voyez en rouge. Grosso modo, ils ont été exposés à une dose de radiation qui dépasse le Sv, soit 1000 mSv. Pour certains malheureusement, ça pouvait monter bien au-delà.
Les gens un peu plus loin, entre 1 et 2 km de l’épicentre, en jaune sur la carte, eux, ils ont été exposés en moyenne à 350 mSv.
Heureusement à mesure qu’on s’éloigne de l’explosion, la dose de radiation décroît assez vite. Les personne à + 2.5 km de l’épicentre n’ont été exposées qu’à des doses inférieures à 5 mSv, soit, rappelons-le, pas bcp plus que la dose moyenne d’un FR en un an, et moins que pas mal d’expositions médicales.
Les doses reçues à Tchernobyl
La seconde catastrophe nucléaire est un accident civil, c’est l’explosion du réacteur numéro 4 de la centrale de Tchernobyl. Tchernobyl c’est une ville en Ukraine, à la frontière avec la Biélorussie. A l’époque en 1986, ces deux pays faisaient partie de l’Union Soviétique.
Les travailleurs, les pompiers, les premiers sauveteurs, les “liquidateurs” , les riverains ont été exposé à des radiations.
On peut ajouter aussi les personnes touchées par le “nuage de Tchernobyl” qui est passé au dessus de quasiment toute l’Europe et d’une bonne partie de l’Asie mineure.
Toute la question c’est : à quelles doses ces différentes catégories de gens ont-elles été exposées ?
Pour répondre à cette question, on est allé voir le rapport le plus récent de l’UNSCEAR, l’organisme des Nations Unies chargé de suivre l’exposition des populations aux risques de radioactivité. L’UNSCEAR, c’est le “GIEC des radiations”. Ils ont fourni un très important travail d’enquête et ils ont passé en revue toute la littérature scientifique disponible sur l’accident de Tchernobyl et ses conséquences.
Ce que nous dit le rapport. c’est que les travailleurs de la centrale, les pompiers, les premiers sauveteurs et certains témoins se sont pris les plus grosses doses.
Ces 134 personnes très irradiées se sont mangées entre 0,8 et 16 Sv ou 16 000 mSv. C’est massif ! [SOURCE : UNSCEAR 2008 p .62]
Ensuite on a les “liquidateurs” : les personnes qui ont éteint l’incendie et contenu les fuites de radioactivité. Eux, y’a aussi des variations d’exposition entre les tous premiers et ceux qui se sont relayés après, mais l’UNSCEAR donne une dose moyenne de 120 mSv [Source : UNSCEAR 2008 p.62]
Les riverains de Tchernobyl ont été rapidement évacués mais ils ont malgré tout été exposés à des radiations. Les 114 500 évacués ont reçu une dose moyenne de 31 mSv. [Source : UNSCEAR 2008 p.82]
Mais comme vous le savez, les poussières du “nuages de Tchernobyl” se sont pas arrêtées aux frontières ni ukrainiennes ni françaises. A quoi avons-nous été exposés ? Les Français, en comptant 30 ans d’exposition (c’est à dire les restes de particules radioactives qui restent dans les champignons, le gibiers, l’herbe des vaches, le lait etc. ) c’est, d’après l’IRSN, en dessous de 0.5 mSv au total sur 30 ans.
Ca c’est la moyenne, mais des enfants de l’Est qui buvaient du lait contaminé ont pu recevoir des doses plus fortes, jusqu’à de 9.4 mSv. C’est le cas maximal théorique que donne l’IRSN pour bien informer tout le monde (p.28).
Les doses reçues à Fukushima
Regardons maintenant le dernier grand accident nucléaire en date : celui de Fukushima.
On est en mars 2011, et un très violent séisme au large du Japon occasionne un tsunami qui frappe la centrale nucléaire de Fukushima, sur la côte est du pays
Un tsunami inonde complètement la centrale, les systèmes de refroidissement des réacteurs lâchent les uns après les autres, les cœurs des réacteurs non refroidis finissent par fondre. Plusieurs explosions et incendies libèrent des grandes quantité de matériaux radioactifs.
En terme de radioactivité, l’accident Fukushima, si vous voulez, c’est un peu un Tchernobyl en beaucoup moins pire.
Les plus exposés aux radiations sont les 20 000 travailleurs qui ont bossé pour contenir l’incendie, réparer les dommages et limiter les fuites de radioactivité.
Ces 20 000 travailleurs ont été exposés en moyenne à 12 mSv de radiation (11.9, IRSN “Fukushima 1 an après”, p.147).
Mais comme d’habitude, il y a des disparités. Sur ces 20 000 personnes, 167 ont été exposés à plus de 100 mSv. Les 6 travailleurs les plus exposés (+ 250 mSv) l’ont été parce qu’ils ne portaient pas de masque à un moment donné, si l’on suit les explications données par Tepco.
Les 412 000 personnes évacuées ont elles reçues des doses inférieures à 2 mSv dans 95% des cas (Source : Somme des lignes 1 et 2 du tableau 4.1, “Radiation monitoring and dose estimation of the Fukushima Nuclear Accident”)