L’entrée dans l’OMC, le grand décollage de la Chine
Déjà, constatons à quelle vitesse le commerce international a pris de plus en plus de place dans l’économie chinoise après son entrée dans l’OMC.
Alors que le commerce international ne représentait qu’un gros tiers du PIB jusqu’en 2001, on voit qu’après 2001, c’est plus de la moitié du PIB chinois qui vient du commerce international, avec un maximum à deux tiers en 2006.
Après son entrée dans l’OMC, en quelques années, la Chine est devenu un acteur clé de mondialisation et du commerce international.
En 1993, la Chine était encore quasi inexistante dans le commerce international. En 2003, la Chine n’en représente pas encore 6%, mais 2018, la Chine fait à elle seule 13.1% des exportations de marchandises du monde. Aucun autre pays ne rivalise avec elle.
La montée en force de la Chine dans le commerce international, c’est aussi les délocalisations. Des multinationales US et européennes qui ont déplacé une partie de leur production industrielle en Chine pour profiter des bas salaires. Ces délocalisations, elles ont entraîné des investissements massifs en Chine que l’on constate sur ce graphique.
A partir de 2001, les investissement étrangers en Chine – en jargon économique on appelle ça les IDE – sont passés de 40 milliards de $ par an dans les années 90 à près de 200 milliards annuels. En 2013, c’est près de 300 milliards de $ qui ont été investis en Chine.
Bien entendu, le déplacement de toute une partie de la production du monde en Chine a fait croître énormément l’économie chinoise dans son ensemble.
Le PIB a été multiplié par 5 entre 2000 et 2019.
La croissance économique est telle que la Chine “atelier du monde” devient bien plus que ça : la Chine devient une superpuissance économique mondiale.
Alors que la Chine ne représentait que 4% du PIB mondial en l’an 2000, elle passe à 9% en 2010 et atteint 14% en 2019, rattrapant à toute vitesse les Etats-Unis et l’Union européenne.
Enfin, elle fait mieux que les rattraper, elle les “grignote”. La part du reste du monde est restée constante sur la période. La Chine a donc “pris” sur les très grosses parts de l’UE et des Etats-Unis.
2 800 millions de Chinois sortis de l’extrême pauvreté
Pour voir à quelle vitesse la Chine est sortie de la misère, on va retrouver les belles animations du site Gapminder qu’on avait déjà utilisées dans notre vidéos sur la population mondiale.
IMPORTANT : Cliquez sur les liens ou sur l’image puis pressez le bouton “play” 🙂
Notre chemin débute en 1990, 10 ans avant l’entrée de la Chine dans l’OMC. A ce moment là, la Chine commence tout juste à ouvrir son économie au commerce international. En 1990, les deux tiers des Chinois vivent avec moins de 1.9 $ par jour, le seuil d’extrême pauvreté retenu par les grandes organisations internationales.
En 2019, la situation des Chinois n’a plus rien à voir. Le niveau de vie moyen est autour de 13, 14 $ par jour, soit 400$/mois par personne. L’extrême pauvreté a pratiquement disparu. Sur cette animation, c’est tellement petit qu’on ne peut pas le dire exactement. Mais la Banque mondiale donne le chiffre de 0.7 % des Chinois vivant avec moins de 1.9$ jour en 2015, soit même pas 10 millions de personne (sur 1.4 milliardss de Chinois)
Alors bien sûr le seuil de 1,9 $ par jour est arbitraire. Certains économistes spécialistes du développement comme le coréen Ha-Joon Chang ou l’indien Sanjay Reddy le jugent trop bas.
EXCURSUS “Les stats sur le béton” :
Entre 2011 et 2013, en 3 ans, la Chine a consommé autant de ciment que les Etats-Unis durant tout le XXe siècle (1901-2000) !!!
En 2019, la Chine c’est 56% du ciment mondial à elle toute seule.
La face sombre : un coût climat énorme
C’est bien simple, dans les années 2000, les émissions de GES chinoises s’envolent. De 2000 à 2013, elles ont été multipliées par 2.7.
Durant cette période, la Chine est la locomotive de l’augmentation mondiale des gaz à effet de serre. Ce graphique vous montre ça clairement.
Dès 2006, la Chine augmente plus ses émissions de GES que tous les autres pays du monde RÉUNIS. De 2006 à 2016, si on fait la moyenne, la Chine est responsable de presque 60% de la hausse des émissions de GES.
Mais pourquoi la croissance chinoise a-t-elle autant émis de GES ?
La raison est extrêmement simple. Pour soutenir sa croissance folle, la Chine a consommé énormément d’énergies fossiles et, surtout, la plus sale d’entre elles, la plus destructrice du climat : le charbon
Ce graphique vous montre la consommation totale d’énergie en Chine de 1990 à 2019. Vous voyez que, depuis 2000, c’est le charbon qui accompagne la hausse de la consommation chinoise. `Si vous regardez la ligne rouge qui vous montre le taux de croissance de la consommation de charbon chaque année, vous voyez que, à partir de 2000, la Chine se lâche sur le charbon. L’utilisation du charbon croît de 9, 10 puis près de 20 % chaque année.
Au fil des années, les émissions chinoises ont tellement augmenté qu’aujourd’hui en 2019 la Chine fait à elle seule 23.5 % des GES du monde. La Chine est devenu le premier pays émetteur, loin devant les Etats-Unis.
Au fil des années, les émissions chinoises ont tellement augmenté qu’aujourd’hui en 2019 la Chine fait à elle seule 23.5 % des GES du monde. La Chine est devenu le premier pays émetteur, loin devant les Etats-Unis.
Et attention, si la Chine est devenu le premier émetteur mondial, ce n’est pas juste parce qu’ils sont méga nombreux.
Regardons les émissions par habitant. Un Chinois en 2015 émet plus qu’un Européen.
Là vous allez peut-être vous dire “oui oui mais c’est parce que la Chine produit plein d’objets pour le monde entier. Si on attribue aux travailleurs chinois les émissions d’un smartphone utilisé par un américain ou un français, ça biaise le calcul. Il faut regarder l’impact de ce que consomment les gens.
Certes, les Européens émettent en réalité un peu plus mais les Chinois émettent par leur mode de vie tout de même 6.1 t CO2 chaque année, soit déjà 80% de ce qu’émet un européen moyen.
Bref, une grande partie du destin du climat et de la transition énergétique va se jouer en Chine.
La Chine en transition
Avec son entrée dans le commerce mondial, la Chine n’a pas seulement sorti des centaines de millions de personne de l’extrême pauvreté. Elle s’est aussi créé une classe moyenne. Et une classe moyenne a des besoins de consommations plus importants qui ont permis à la Chine de recentrer son économie sur son marché intérieur après la crise de 2008.
Ces dernières années, vous voyez que la part du commerce international dans l’économie chinoise a chuté un peu en dessous de 40%. En d’autres terme, aujourd’hui, plus de 60 % de l’économie chinoise est tirée par la consommation et la production intérieure de la classe moyenne.
Cette classe moyenne, elle est urbanisée, elle a accès à des infrastructures et, comme toutes les classes moyenne du monde, elle veut des services. Elle veut des restaurants, des coiffeurs, des banques, du tourisme, de l’hôtellerie, des cinémas. Et que remarque-t-on en Chine ces dernières années ? Une montée de la part des services dans l’économie.
De même, aujourd’hui, la Chine n’est plus l’eldorado des productions à bas coûts. Les salaires chinois ont progressé si bien qu’en 2014, ils sont déjà 4-5 fois supérieurs à ceux du d’autres grandes économies émergentes de la région : Pakistan, de l’Indonésie ou de l’Inde.
Voilà pour les enjeux économiques. Mais c’est impossible de passer sous silence l’autre immense problématique de la Chine actuelle : la transition énergétique et la lutte contre les pollutions.
Soyons réalistes. La demande chinoise en énergie est telle qu’il sera long, difficile et surtout coûteux de se passer d’un charbon pas cher, qu’elle puise dans son sous-sol à plus de 90%. En effet, selon la BP Statistical Review of World Energy 2020, la Chine n’importait en 2019 que 6.4 EJ de charbon sur les 81.67 EJ qu’elle consommait. Elle a donc produit 92.2 % de son charbon domestiquement.
Cela dit la Chine est très bien placée sur les énergies renouvelables. Toujours selon la BP statistical review of world energy 2020, 35 % du photovoltaïque et 34 % des éoliennes du monde construits en 2019 l’ont été en Chine. La Chine est donc le plus grand installateur d’ENR en 2019.
Pareil, la Chine est bien placée sur d’autres volets de la transition énergétique. Figurez-vous même que, en 2018, le constructeur ayant vendu le plus de véhicules électriques était chinois. La marque chinoise BYD ‘Build your dreams” a vendu plus de voitures électriques que Tesla, Nissan ou Volkswagen.